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Graham Hill, l’homme à la Triple Couronne

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Dans le monde de la compétition automobile, il y a des victoires qui marquent plus que d’autres. Pas forcément parce qu’elles ont été plus difficiles à obtenir, mais simplement parce que le lieu où elles ont été acquises symbolise le St Graal de la discipline. C’est le cas du  Grand Prix de Monaco pour la formule 1, des 24Heures du Mans en endurance ou des 500 miles d’Indianapolis pour l’IndyCar. A ce jour, un seul homme a réussi l’exploit de gagner au moins une fois chacune de ces épreuves considérées comme les plus prestigieuses courses du monde : Graham Hill. Une bonne raison pour se rappeler dans quelles conditions le pilote Anglais est parvenu à conquérir cette Triple Couronne.

Monaco 1963

Coïncidence, c’est à Monaco en 1958 que Graham Hill court son 1er GP de Formule 1 au volant d’une Lotus Climax. Cette première participation se termine par un abandon. C’est en 1962, sur BRM, qu’il marque son premier point dans le principauté avec une  6ème place. Cette année là, il décroche son premier titre de champion du monde en remportant 4 Grand Prix dans la saison.

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C’est donc tout auréolé de son titre qu’il se présente à Monaco, premier GP de la saison 1963.
C’est au volant d’une BRM P57 qu’il prend part aux essais. Ceux-ci se déroulent sans problème pour G Hill et il décroche le 2ème temps derrière la Lotus de son compatriote Jim Clark.

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Dès le départ, G Hill s’empare du commandement et devance son équipier Richie Ginther à l’issue du premier tour. Rapidement, Clark revient sur sur la BRM et passe en tête augmentant son avance en abaissant régulièrement le record du tour.
Mais alors que l’on se dirige vers la victoire de l’écossais sa Lotus rencontre un problème de boite de vitesses. Les roues de sa voiture se bloquent provoquant une sortie de route. La chance est du côté de G Hill qui reprend la première place qu’il ne quittera plus jusqu’à la ligne d’arrivée.

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Ce succès, le premier pour l’Anglais à Monaco, sera suivit de 4 autres victoires en principauté puisqu’il gagne à nouveau sur BRM en 64 et 65 puis pour Lotus en 68 et 69. Ces 5 victoires en font longtemps le « Roi de Monte-Carlo » avant qu’Ayrton Senna le détrône en gagnant une 6ème victoire en 1993.

Graham Hill le « Roi de Monaco »

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Indianapolis 1966

Comme c’est le cas depuis de nombreuses années, la réglementation régissant les courses sur ovales aux USA est bien différente que celle du championnat du monde de Formule 1. L’épreuve américaine ne figure donc pas au championnat F1 et celui qui veut s’aligner au départ de la course la plus célèbre du continent ammérician doit développer une voiture spécialement adaptée pour l’occasion.
Mais celà n’effraye pas les écuries anglaises et pendant plusieurs saisons elles viennent défier les pilotes américains sur leur terrain de jeu favori.
Si en en 1963 Jim Clark, sur sa Lotus à moteur Ford, manque le coche d’un rien en terminant 2ème derrière Parnelli Jones, il y parvient en 1965 où, toujours sur Lotus Ford, il l’emporte.
C’est la première victoire pour un pilote non américain depuis la reprise de l’épreuve après la guerre et c’est la première défaite du célèbre moteur 4 cylindres Offenhauser qui équipe habituellement la quasi totalité des voitures américaines inscrites aux 500 Miles.
Inutile de dire que la première place acquise par Jim Clark n’a pas fait rire les pilotes locaux remontés à bloc quand l’édition 66 se profile. Surtout que cette année une nouvelle menace vient mettre la pression sur les teams américains avec la présence supplémentaire de deux Lola pilotées par Graham Hill et Jacky Stewart. Certes, ce sont 2 rookies aux yeux des autochtones mais chacun sait qu’ils sont tout à fait capables de tenir tête aux meilleurs.

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Si aux essais c’est Mario Andretti qui réalise le meilleur temps, c’est sur une voiture anglaise qu’il le fait puisqu’il s’aligne sur une Brabham à moteur Ford. Le reste de la grille montre la supériorité des monoplaces européennes puisque seul Parnelli Jones sur sa Shrike à moteur Offy à compresseur a réussi à se glisser en 2ème ligne au milieu de 12 moteurs signés Ford.
Graham Hill, au volant d’une voiture qu’il connaissait à peine, se place en 5ème ligne.

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Ce sont 33 voitures que libère la Mercury de la direction course quand elle rentre dans la piste de décéleration. Malheureusement, à peine le départ donné, c’est un terrible accident qui va mettre sur la touche près de la moitié du plateau.

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Suite à une manoeuvre hasardeuse, Billy Foster envoie onze voitures au tapis, cinq autres devant repasser par les stands pour réparations. Parmi les abandons, on compte deux favoris, AJ Foyt et Dan Gurney.
Un nouveau départ est donné près d’une heure et demie plus tard sous un régime de drapeau jaune de façon à nettoyer la piste de la chaux utilisée pour absorber l’huile et le carburant perdus par les monoplaces lors du crash du 1er tour.
Dès le drapeau vert agité, la tête de la course change régulièrement de leader puisqu’àprès avoir vu Clark mener pendant plus de 60 tours, c’est Ruby sur une Eagle-Ford qui prend le relais avant de rendre la tête à l’anglais suite à un ravitaillement. Stupeur au 84ème tour, Clark et victime d’un nouveau tête à queue, son deuxième. Il laisse repasser l’Eagle qui va conserver le lead jusqu’à moins de 50 tours de l’arrivée où une fuite d’huile l’oblige à stopper définitivement. Graham Hill, parti prudemment commence à remonter sur les premiers. C’est là qu’un mauvais panneautage du stand Lotus va peut-être faire perdre la course à Clark. Convaincu d’avoir un tour d’avance sur la Lola, il se laisse dépasser alors qu’il est dans le même tour que son compatriote. Stewart, toujours en course et en pleine remontée sur son coéquipier doit abandonner à 8 tours de l’arrivée alors qu’il s’apprêtait à prendre la tête. La fin de course est confuse. Hill passe le premier sous le drapeau à damier mais ne sait pas que c’est lui le vainqueur alors que Clark et toute son équipe sont persuadés que c’est l’écossais qui vient de gagner. Seul Eric Broadley le patron de Lola a vu  ou plutôt compté juste puisque Graham Hill est officiellement déclaré vainqueur de ces 500 Miles d’Indianapolis 1966.

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Dans sa quête de la Triple Couronne, Graham Hill vient de franchir la 2ème étape. Reste plus maintenant qu’un troisième challenge à relever: gagner les 24 Heures du Mans.

Le Mans 1972

Graham Hill, contrairement à Indianapolis, ne découvre pas la course des 24 Heures. Sa première participation date de 1958 où sur une Lotus 15 il doit abandonner au bout de la 2ème heure. La chance ne va pas lui sourire pour les éditions suivantes puisqu’il doit à chaque fois il ne voit pas la ligne d’arrivée en 59, 60, 61 et 62. En 1963, il est bien présent mais comme invité, sa voiture, la Rover BRM à turbine portant le n°00 est hors classement. C’est en 64 qu’il obtient, enfin, son premier bon résultat sur la piste mancelle. Avec Joachim Bonnier comme équipier, c’est sur une Ferrari 330P  qu’il termine 2ème derrière la Ferrari 275P de Vaccarella/Guichet.
En 65, c’est au volant de la Rover BRM à turbine, cette fois inscrite officiellement, qu’il termine 10ème en compagnie de Jackie Stewart alors qu’il doit abandonner en 66 sur une Ford MKII.
Pendant 5 saisons, l’anglais délaisse la piste de la Sarthe et ce n’est qu’en 1972 qu’il y revient au volant d’une des Matra 670 engagées par Matra Sport.
Malgré les réticences d’Henri Pesacarolo à faire équipe avec un « vieux » qu’il imagine non motivé et dépassé et sur l’insistance du journaliste Jabby Crombac, Matra engage Graham Hill comme coéquipier du français. C’est l’unique course de l’année pour l’équipe de Jean Luc Lagardère qui a décidé de jouer sa saison en endurance sur la seule épreuve mancelle. 

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Les essais se passent au mieux pour Hill puisque sa voiture se retrouve en 2ème position sur la ligne de départ, juste derrière la plus rapide des Matra pilotée par Cevert/Ganley.
La course va se résumer assez rapidement en un duel entre ces deux voitures  après l’abandon de Beltoise au volant de la 3ème des 670.
Les deux équipages de tête se succèdent au commandement pendant la quasi totalité de la course. La pluie fait son apparition dans la nuit rendant la conduite particulièrement dangereuse. Le pilotage de Hill dans de telles conditions est grandiose. Il accomplit des relais parfaits ce qui permet à la n°15 de pointer en tête à 4 heures du drapeau à damier. L’avance prise sur la n°14 est tel que les dernières heures de course ne seront qu’une formalité pour Hill/Pescarolo qui franchissent en vainqueur la ligne d’arrivée. Pescarolo reconnaitra après coup que Graham Hill a réalisé une course fabuleuse, en particulier la nuit sous la pluie et qu’il est un pilote d’exception. Beau mea-culpa de la part de celui qui avait peur d’avoir pour équipier un presque « retraité ».

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Jean Luc Lagardère peut exulter quand il monte sur le podium. Matra a gagné, le choix de Hill était plus que judicieux et il peut dès à présent envisager une participation plus conséquente de sa marque au championnat du monde d’endurance.

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Pour le pilote britannique, et même si l’objectif premier était avant tout de faire gagner l’équipe française, il vient d’accomplir le dernier exploit lui permettant de conquérir la Triple Couronne, trophée officieux attribué au pilote vainqueur à Monaco, Indianapolis et au Mans.
Durant ses épreuves, il n’aura sans doute pas été le plus rapide des hommes sur la piste, mais à chaque fois, il a su faire une course où le mixte qualité du pilotage,  intelligence et facteur chance lui ont permis de vaincre.
A ce jour, il reste le seul pilote à avoir décrocher cette Triple Couronne. Tous ceux qui ont depuis essayé ont vu leur leur compteur s’arrêter à deux sur trois. 
Il n’est pas impossible qu’un jour quelqu’un réussisse à nouveau cet exploit, mais il est certain que personne ne pourra enlever à Graham Hill le fait d’avoir été le premier à le réaliser.

 

Crédit Photos : Pinterest, Indycar, Drivertribe, StatsF1, GrandPrix, Largus

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