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Peter Monteverdi : le Grand Tourisme de Luxe « swiss made »

Quand on parle de l’industrie Suisse, on pense immédiatement aux fabriques de montres, aux usines pharmaceutiques ou encore à celles qui produisent le fameux chocolat. Rare sont ceux qui s’imaginent que quelques marques automobiles ont pu voir le jour en Helvétie. Pourtant, une de celles-ci fit parler d’elle à la fin des années 60, en imaginant pouvoir rivaliser avec les plus prestigieuses marques italiennes : Monteverdi. Si l’aventure dura moins de vingt ans, elle mérite un petit rappel, sa production confidentielle n’ayant laissé personne indifférent.

Peter Monteverdi, un autodidacte touche à tout.

Monteverdi 2

Peter Monteverdi est né en juin 1934 dans les environs de Bâle en Suisse alémanique. Son père, propriétaire d’un garage, l’envoie en apprentissage chez un fabricant de tracteurs puis chez Saurer, connu pour ses autobus.
Très vite, il s’intéresse à l’automobile et à la course au point de fabriquer ce qui sera sa première voiture à partir d’une Fiat Ballila : la Monteverdi Special.

Monteverdi 3

1956 va être une année décisive pour le jeune Peter. Il perd son père de façon brutale, et se retrouve à la tête du garage familial à 22 ans. C’est aussi cette même année qu’il fait l’acquisition de sa première Ferrari une 250MM berlinetta signée Vignale de 1954 (châssis 0334MM). Son achat lui coûte 10000frs suisse plus sa Porsche 356. Il inscrit sa nouvelle acquisition à quelques épreuves, mais sans réel succès. Il continue aussi à fabriquer des karts ou quelques voitures qu’il commercialise sous le nom de MBM. C’est ainsi que l’on voit apparaître une barchetta à moteur Osca appelée SP100.

Monteverdi SP100


SP100

Ou, un petit coupé dont le moteur a été empruntée à la Ford Anglia.

Coupé MBM


Coupé MBM

Dans les deux cas, la carrosserie est en polyester ce qui permet de produire des voitures extrêmement légères.
C’est lors d’un de ses voyages à Maranello qu’il rencontre Enzo Ferrari. Celui-ci lui propose de devenir son agent exclusif sur une partie de la Suisse. A un peu plus de vingt ans, Peter devient le plus jeune concessionnaire de la marque au cheval cabré.
Il en profite pour participer à quelques courses au volant d’une Ferrari 500TR.

Monteverdi 6

    

Il continue aussi à transformer certaines voitures. C’est à la demande d’un de ses clients qu’il transforme une 750 Monza spyder Scaglietti en un coupé dont il confie à la carrosserie Sauter la réalisation.

Monteverdi 7

Il se lance aussi dans la fabrication d’une monoplace à moteur Porsche, la MBM FJ. C’est lors d’une des premières courses à son volant qu’il est victime d’un accident sur le circuit d’Hockenheim en Allemagne.

Monteverdi 8

Il s’en sort avec de graves blessures qui l’immobilisent quelques temps et qui donnent un coup de frein brutal à sa carrière de pilote.
Pendant cette même période, il continue à développer sa concession et accroche au fronton de son garage les marques Lancia, BMW, Bentley et Rolls Royce.
Bien lui en a pris car un évènement non prévu va venir perturber la bonne marche de ses activités.
En effet, après avoir refusé de payer par avance les voitures que Ferrari devait livrer à sa concession, la marque au cheval cabré décide de rompre le contrat le liant à Peter Monteverdi. C’est un rude coup, mais cela va être aussi une belle opportunité pour aller jusqu’au bout de ses idées.

Monteverdi : quand la Suisse se met à la GT de luxe.

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Une des premières décisions qu’il prend, est l’abandon de la marque MBM et la commercialisation de GT sous son propre nom. C’est ainsi qu’est lancé le projet qui va aboutir à la fabrication de la première voiture vendue par sa nouvelle société, la Monteverdi High Speed 375 S qui est présentée au salon de Francfort en septembre 1967.
La marque suisse va jouer la sécurité en optant pour un moteur d’origine américaine, considéré comme plus fiable que la mécanique sophistiquée animant les Ferrari. C’est un V8 Chrysler de 7,2l qui est choisi. Il développe près de 375cv et est accouplé à une boite automatique.
La production du châssis est confiée à Stahlbau situé à proximité des ateliers Monteverdi. L'ensemble roulant est ensuite envoyé en Italie pour recevoir la carrosserie. Celle-ci est réalisée par Frua. Elle repart ensuite à Binningen pour un dernier contrôle.

Monteverdi 375S


Monteverdi 375S

La voiture est plutôt bien accueillie par la presse qui retrouve en elle les superbes lignes de la Maserati Ghibli. Les performances sont au rendez-vous puisqu’elle est capable de cruiser à 250km/h forte de ses 375cv.
Les choses vont se gâter quand Peter Monteverdi décide d’augmenter la cadence de production de sa GT. Frua est incapable de répondre à sa demande, son atelier est beaucoup trop petit pour cela. C’est la rupture entre lui et son commanditaire suisse qui décide alors de se tourner vers Fissore pour prendre la suite. 
En 1969, ce dernier commence aussi à produire la 375 L, une 2+2 qui doit être le pilier de la gamme Monteverdi.
Cette même année, à Londres, une 375 S transformée par le carrossier turinois est présentée. Elle est construite sur la base de celle de Frua. Elle reste un coupé deux places avec le moteur V8 Chrysler dans sa dernière évolution.
L’avant a été retouchée, et la ligne semble plus fluide que celle de la première version.

Monteverdi 375S Fissore 1
Monteverdi 375S Fissore 2

Monteverdi 375S Fissore 1969

En 1971, au salon de Genève sortent deux nouveaux modèles. La 375/4, une quatre portes construites sur la base de la 375L.

Monteverdi 375C 1
Monteverdi 375C 2

On y présente aussi la 375C construite sur la base de la 375S de Fissore.

Monteverdi 375C


Monteverdi 375C

Celui-ci évoluera en Monteverdi Palm Beach en 1975.

Monteverdi Palm Beach

Monteverdi Palm Beach

En 1970, Monteverdi présente une nouvelle voiture, la Hai 450 SS. Si la paternité du design semble revenir à Trevor Fiore, un doute subsistera puisque Peter Monteverdi le revendiquera également. La voiture possède une carrosserie en acier reposant sur un châssis, en tubes rectangulaires, réalisés dans la même matière. Le moteur, en position centrale, est le Chrysler Hemi V8 de presque 7 litres développant 450cv. Elle est donnée pour une vitesse de pointe avoisinant les 290km/h, vitesse respectable à cette époque.

Monteverdi Hai 1
Monteverdi Hai 2


Monterverdi Hai

Beaucoup de mystère entoure cette voiture. Il semblerait que 2 exemplaires furent produits, un exemplaire tournant d’un salon à l’autre changeant plusieurs fois de couleur. 
Peter Monteverdi montrera une mauvaise volonté évidente à servir ses clients intéressés par la Hai, essayant à tout prix à les orienter vers les autres modèles de la marque.

De la GT au 4X4 puis à la F1

Le constructeur suisse abandonne alors petit à petit la fabrication de ses luxueuses mais chères GT au profit de 4X4. Pour base, il utilise des International Harvester, marque américaine de SUV. C’est ainsi que sort le Safari en 1976.

Monteverdi Sahara

Puis le Sahara en 1978

Monteverdi Sahara 2

Pour ce qui est des berlines, il emploie le même principe en produisant la Sierra, basée sur la Plymouth Volare et la Tara qui profite des soubassements de la Mercedes Classes S.
Sa plus belle réussite dans le domaine des « transformations » à partir d’une base existante, c’est avec le Range Rover qu’il va l’obtenir. Sur la base du 2 portes, il fait réaliser par Fissore un quatre portes sans pour autant allonger l’empattement. Ce sera une réussite puisque la marque anglaise le mettra à son catalogue en payant sur chaque vente des royalties à Peter Monteverdi.

Range Rover

A partir de cette période, le suisse va se consacrer à divers projets pas forcément en lien avec l’automobile. Ce n’est que dans les années 90, qu’il tente une percée dans la F1 mais ce, sans aucun résultat, ses voitures végétant en fond de grille
Il en profitera alors pour essayer de relancer la Hai. Il utilise un châssis d’une de ses F1 motorisée par le V8 Ford-Cosworth. Même si la 650 semble intéresser quelques clients, elle ne sera jamais lancée en production.

Monteverdi 23

En 1984, la société est déclarée en faillite est l’usine de Bâle transformée en musée dédié à la marque.
Peter Monteverdi décède en 1998 peu après la fin de son aventure peu convaincante en Formule 1.
Il est très difficile de connaître exactement le nombre de voitures produites. Au total, c’est un peu moins de 3000 véhicules qui seraient sortis des ateliers de la marque, y compris les 4X4 et berlines vendues après 1975. Si l’on ne prend en compte que la période des 375 et 450 Hai, ce sont environ 180 voitures qui auront été commercialisées de 1968 à 1975.
Même si cette production est faible, on ne peut pas parler d’échec. La volonté de la part de Peter Monteverdi de rester seul maître à bord ne lui a certainement pas permis de se développer comme certains auraient pu le souhaiter. 

Crédit photos : Pinterest, MC, Archives Monteverdi, Auta 5p, Primotipo, autoweekvirtualgreencarshow, autoalmanach, swisscamion, classisdriver.
 


 

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