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Citroën SM, elle est devenue mythique... mais c'était pas gagné !

Aujourd’hui, la place de la Citroën SM au rang d’icône de l’automobile française n’est plus sujette à débats. Mais quand elle est apparue et surtout quand elle a disparu, il faut bien dire c’était peu évident. On revient sur sa (courte) carrière.

La GT française

Un grand coupé, Grand Tourisme, avec 4 places, une ligne séduisante et un moteur performant, voilà un segment qui fait rêver. Seulement en France, avec la disparition des Delahaye, Salmson, Hotchkiss et autres dans les années 50, on reste un peu sur notre faim. L’aventure Facel Vega a le mérite d’exister mais montre que l’exercice est périlleux… et qu’il faut chercher hors de France pour trouver un moteur !

Si Renault, Peugeot et Simca proposent bien des coupés dans leur gamme, ce sont des “petits” coupés. Leur motorisation n’a pas vocation à faire rêver, elle est performante mais doit surtout permettre de vendre ces autos, le top de la gamme de chaque marque, en grand nombre.

Reste Citroën. Le haut de gamme, c’est bien entendu la DS, la reine incontestée du segment, voire des routes françaises. Pour ce qui est des versions coupés, les chevrons s’en sont remis à Chapron. Mais Chapron n’est pas Zagato, les coupés sont luxueux et élégants, pas plus performants.

C’est bien en “trouvant” la mécanique que Citroën va sauter le pas. En 1968 la marque rachète Maserati. Le constructeur de Modène possède des moteurs intéressants dans sa gamme… mais pas celui dont a besoin Citroën. Le V8 est moderne mais trop gros (pour le marché français surtout) et le 6 cylindres en ligne est sur la fin. Il faut un V6, parfait compromis.

C’est le V8 qui va être le point de départ. En fait on va l’amputer de deux cylindres… mais seulement pour montrer qu’on sait faire ! Ce moteur restera un prototype et Maserati repartira d’une feuille blanche pour créer un V6. La confusion sur le fait qu’on ait gardé un V8 “coupé” vient du fait que le moteur de 2670 cm³ est un V6 à 90°, angle normalement réservé aux V8. La mécanique est intéressante avec 170 ch annoncés (mais rarement mesurés) mais surtout un beau couple, qui colle bien à son utilisation de GT.

V6 Citroën SM

Les premiers prototypes circulent vite, dans des caisses de DS raccourcies. Comme toute Citroën haut de gamme, il faut de l’hydraulique. L’assistance du freinage à 4 disques, s’en servira, tout comme la suspension. La direction y fera également appel pour son assistance. Mais le système de DIRAVI (DIrection à Rappel Asservi à la VItesse) se distingue surtout par un rappel de la direction. En ligne droite, et pour éviter les corrections de trajectoire, la direction revient toute seule au centre. Plus la vitesse augmente, plus c’est sensible. La nouvelle auto sera une autoroutière et les limitations de vitesse ne sont alors pas en vigueur. Autre temps, assurément !

Prototype Citroën SM

Reste la ligne. Pour se montrer aux côtés de la DS, il faut marquer. Le style doit être futuriste, mais c’est surtout l’aéro qui est visée. L’équipe de Robert Opron, qui a déjà revu le style de Bertoni sur la DS, va façonner une belle carrosserie alliant lignes tendues et formes douces. Opron en profite pour y glisser sa “signature” avec la lunette arrière bulle. La signature de l’auto restera pourtant sa face avant avec les 6 projecteurs sous vitre, dont deux sont directionnels.

Citroën SM

Enfin, pour une GT, il faut gâter les quatre occupants. Le volant est original : il n’est pas rond mais surtout c’est le premier en Europe à être réglable en hauteur et en profondeur. On ajoute des équipements haut de gamme comme la climatisation et un autoradio pour chaque auto.

L'intérieur de la Citroën SM

La Citroën SM naît en Suisse !

On ne va pas attendre le salon de Paris pour dévoiler l’auto. C’est en Mars 1970 qu’elle est dévoilée, au Salon de Genève, lieu parfait pour une telle auto.

Citroën SM au salon de Genève 1970

La Citroën SM impressionne avec ses 220 km/h en pointe et les 100 km/h atteints en moins de 10 secondes, le tout dans une auto française ! Les qualités de l’auto sont reconnues, même si la DIRAVI peut déranger.

L’industrialisation est lancée. L’assemblage se fait Quai de Javel avec des moteurs venant de Modène et une carrosserie venant de chez Chausson.

Le vrai problème de la Citroën SM va pourtant vite se révéler. Avec un prix largement supérieur à la DS, elle peine à se vendre. Seules 868 autos sont fabriquées en 1970. La cadence va monter peu à peu et on va lancer réellement la machine à coup d’évolutions constantes.

En 1971 on propose ainsi de nouvelles jantes. Développées par la maison-mère, Michelin, ces roues en résine reposent sur un brevet racheté à la NASA. Un an et demi après qu’on ait marché sur la Lune, ça compte ! Avec 4,2kg, elles sont deux fois moins lourdes que les roues d’origine !

Cette année-là on propose aussi une SM prête pour affronter le marché américain. Elle perd la bulle sur les phares, interdite depuis une loi de 1937. On la dote, évidemment, d’une boîte automatique Borg-Warner à 3 rapports. Pour contrer la baisse de performances, le V6 passe à 3 litres. La voiture va vite se faire un nom, bien aidée par le titre de voiture de l’année 1972 du magazine Motor Trends. Malgré un réseau faiblard et un prix de 10.000 $ plutôt salé, elle séduit les américain en quête d’originalité.

Citroën SM US

Toujours fin 1971, Chapron dévoile sa première création sur base de SM. C'est la SM Mylord, un cabriolet sans arceau, proposé à Citroën qui a renoncé. L'auto sera produite à 5 exemplaires en deux ans et n'est qu'une première étape.

Citroën SM Opera

Suivront la Berline Opera, avec un empattement de 29cm plus long et 4 portes, produite à 7 exemplaires entre 1972 et 1974 et surtout la SM Présidentielle, une découvrable sur base d'Opera, encore rallongée, qui sera une véritable auto d'apparat pour la présidence française, qui transportera la Reine d'Angleterre et d'autres personnalités et qui restera en service jusqu'en 2007 !

Citroën SM Présidentielle

Pour autant, les ventes générales ne décollent pas. On propose d’autres évolutions. La Citroën SM passe à l’injection en Septembre 1972. En Juillet 1973, la boîte auto est proposée en Europe.

Moteur à Injection Citroën SM

Le gros souci de la Citroën SM intervient à la fin de l’année 1973. C’est le choc pétrolier qui fait passer le baril de 3 à 18$. Il revient finalement à 12$ mais le mal est fait. La Citroën SM, qui embarque le plus gros moteur français est la cible de critiques de la part des pouvoirs publics qui veulent limiter la consommation de carburants en France (et donc éviter une balance commerciale trop défavorable). Néanmoins, la consommation de l’auto n’est pas réellement le problème. Si elle se situe autour des 10 litres aux 100 km en moyenne, elle reste inférieure à la consommation des anglaises, allemandes et italiennes qui sont ses concurrentes !

L’autre coup d’arrêt est arrivé un peu avant. C’est la généralisation des limitations de vitesse en France, à partir de Juin 1973, à 100 km/h hors agglomération. Le chiffre tombe même à 90 km/h avec les effets du choc pétrolier. Si ça touche peu les autos populaires, l’intérêt d’une voiture performante comme une Citroën SM s’en trouve atteint.

Citroën SM sur Route

Les ventes de l’auto s’écroulent. Moins de 3000 autos sont vendues en 1973 et moins de 300 en 1974. Les dernières autos sont assemblées chez Guy Ligier. Mais la SM est sur la mauvaise pente. En 1975, 115 autos sont produites. Peugeot est prêt à débarquer et la Citroën SM sera certainement une victime du rachat. On ne laisse pas ce temps à Peugeot et on arrête définitivement la production après 12.920 exemplaires produits.

La Citroën SM a donc joué de malchance. Mais il ne faut pas oublier les critiques qu’elle a reçues en son temps. Si les performances étaient saluées, les problèmes de jeunesse, en particulier au niveau du moteur et de sa distribution, ont nui à son image. Enfin, il était toujours difficile de vendre une auto si chère, le double d’une DS 23, à une clientèle qui poussait également la porte de la concession à la recherche… d’une 2CV !

La Citroën SM en collection

Vraie star du monde de la voiture ancienne, c’est LA Citroën ultime pour beaucoup de collectionneurs. Son prix s’en ressent et ne cesse de grimper. Il faut désormais compter plus de 35.000 € pour un exemplaire en très bon état. Quand l’état se fait concours, on grimpe même autour des 60.000 € ! Cela ne refroidit pas les collectionneurs, qui ont bien raison de se faire plaisir dans une auto vraiment à part.

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